Par Dan Nixon
Actualités du Rotary
26 février 2014

 
 
Jamais un vaccinateur contre la polio n'avait posé les pieds à Killi Baksho près de la frontière entre le Pakistan et l'Afghanistan. La majorité de la population s'oppose aux vaccins pensant qu'ils causent l'infertilité ou apportent le sida.

Cette méfiance de la population, combinée aux menaces de groupes militants, a causé la mort de 20 vaccinateurs et 9 policiers en 2013 dans cette région du Pakistan. Consciente du danger, une équipe soutenue par le Rotary s'est tout de même rendue dans le village pour promouvoir le recours au vaccin. Il a fallu d'abord un mois pour convaincre les chefs du village et religieux de les rencontrer mais leur persistance a fini par payer car les vaccinations ont enfin pu être autorisées.

Malheureusement, la campagne a rapidement été bloquée à nouveau.

« Après que l'équipe ait vacciné la moitié des enfants, des militants ont commencé à s'en mêler, affirme Asher Ali, en charge du projet pour la commission PolioPlus du Pakistan. Mais les chefs locaux ont défendu l'équipe et les vaccinations ont pu reprendre. »

Les Rotariens ont mis en place sept centres de ressources sur la polio au Pakistan afin de gagner la confiance des populations dans les régions les plus à risque. Soutenus par des Rotary clubs locaux, les centres parrainent des camps sanitaires qui proposent des vaccins contre la polio ou la rougeole, des consultations gratuites, des médicaments, des suppléments de vitamine A ou des lunettes. Ils sensibilisent également les écoles à l'importance de la vaccination.

Les Rotariens travaillent aussi avec certains chefs religieux musulmans au sein de la commission PolioPlus des oulémas du Pakistan pour soutenir la campagne d'éradication dans le pays. Ces efforts ont ainsi permis d'atteindre des enfants qui ne l'auraient pas été sans cette collaboration et de convaincre les parents les plus réticents. Un succès qui se répand par ailleurs aux communautés voisines.

Gagner la confiance des populations locales est essentiel à la réussite de la phase finale de l'éradication de la polio dans le monde. Le Rotary et ses partenaires de l'Initiative mondiale pour l'éradication de la polio travaillent d'arrache-pied dans les derniers pays où la transmission du virus n'a pas encore été stoppée : Afghanistan, Nigeria et Pakistan.

Au Nigeria, un réseau de plus de 3 000 bénévoles initié par l'UNICEF et financé par la Fondation Bill & Melinda Gates et le centre américain pour la prévention et le contrôle des maladies assurent par exemple la promotion du vaccin dans les zones les plus à risque. Dans l'état de Kano, où la majorité des enfants souffrent de malnutrition, les bénévoles mettent ainsi les familles en contact avec des centres nutritionnels et les parents qui auparavant refusaient toute vaccination reviennent souvent sur leur décision.

L'Afghanistan, où aucun cas de polio endémique n'a été signalé en 2013, ne compte plus que 11 cas, tous importés du Pakistan voisin. Ce résultat reflète les efforts de mobilisation sociale réalisés par les bénévoles, les chefs de village et les leaders religieux.

Même si les Talibans ont cessé de s'opposer systématiquement aux vaccinations dans certaines régions, des problèmes surgissent parfois. Le personnel de l'UNICEF enquête alors sur place pour en connaître les raisons - que ce soient des accusations de corruption ou une méfiance envers les personnes en charge de la campagne – et travaille avec les autorités pour dénouer la situation. Une stratégie qui a permis de se rendre dans des zones inaccessibles depuis plusieurs années et qui a entraîné une diminution du nombre de familles refusant de vacciner leurs enfants.

Dans de nombreux pays, le Rotary a recruté des personnalités pour devenir ambassadeurs de l'éradication de la polio. C'est le cas au Pakistan avec la participation de la star du cricket Shahid Afridi. Il fait partie de la communauté Pachtoune qui regroupe 15 % de la population mais 80 % des cas de polio. Au Nigeria, c'est l'acteur Sani Danja qui s'occupe de sensibiliser les populations de langue Hausa dans le Nord du pays.